Cet article retrace l’expérience de Jade, bénévole de New Hera, en tant que bénévole dans un sanctuaire pour kangourou. Elle nous parle de son quotidien, et nous permet d’en savoir plus sur les conditions des marsupiaux en Australie.
Lorsqu’on évoque l’Australie, l’une des premières images qui nous vient en tête est certainement celle du kangourou, tant cet animal endémique est emblématique du sixième continent. Troisième emblème le plus reconnaissable au monde après la Tour Eiffel à Paris et la Statue de la Liberté à New-York, il est le symbole d’espoir et de progrès. En effet, leur anatomie unique offre aux marsupiaux la possibilité de sauter uniquement en avant, autrement appelé le « hoping ». Les kangourous ne peuvent pas aller en arrière. Il existe en réalité plusieurs dizaines d’espèces, et toutes trouvent leur provenance en Australie.
Durant mon voyage, j’ai eu la chance d’être au plus près de ces animaux et de contribuer à la préservation de leur espèce. Cette expérience volontaire m’a permis de m’occuper de kangourous de l’est, kangourous d’ouest, wallabies et wombats.
Le sanctuaire pour kangourou
Au sanctuaire, nous nous occupions de plus de 120 kangourous répartis dans différents enclos et chambres. Blessés, orphelins ou malades, chacun d’entre eux demande une attention particulière en fonction de leur besoin.
Dans les Nouvelles Galles du Sud (NSW), l’état dans lequel se trouve le sanctuaire Possumwood, une maladie touche les marsupiaux. Elle attaque leur peau et affecte leur mobilité. La bactérie se loge principalement dans les recoins de leurs pattes avant et arrière. Si celle-ci n’est pas traitée, l’infection peut conduire à une immobilité totale de leurs membres et ainsi, leur mort.
Quotidiennement, nous organisions des bains dans lesquels nous diluons une très faible quantité de javel pour tuer la bactérie et nous lavions les kangourous avec des shampoings spéciaux. Il faut ensuite les brosser avec attention de sorte à enlever les plaques de peaux mortes infectées. Le processus est à répéter pour chacun d’entre eux entre 3 et 6 fois pour éliminer complètement l’infection. C’est un long travail, sachant que presque la moitié des kangourous recueillis ont la maladie et qu’ils pèsent entre 35 et 80 kg !
Malheureusement, il nous est arrivé de ne pas pouvoir en sauver. C’est toujours un moment triste quand nous sommes contraints d’euthanasier une bête pour mettre fin à ses souffrances. Car oui, on s’attache à ces petits animaux qui ont tellement d’amour à donner. Les kangourous sont affectueux et très joueurs. Au fil du temps, on apprend à les connaître individuellement et croyez-moi, certains ont un sacré caractère !
Les sauvetages
Une autre partie du volontariat dans un sanctuaire pour kangourou consiste à opérer des sauvetages.
En effet, de nombreux kangourous sont percutés sur la route en Australie et laissés pour mort alors qu’ils ne le sont pas. Quand il n’est pas trop tard, nous récupérons l’animal généralement gravement blessé. C’est aussi dans ce genre de situation que nous retrouvons des orphelins. Ils sont encore dans la poche de leur mère. Il est difficile de sauver les bébés s’ils sont trop jeunes qui ne survivent pas sans leur mère et leur poche.
Autre cas assez courant, lorsque les pattes arrières des animaux se retrouvent coincées dans les barrières de terrains.
Dans ce cas, c’est dans le local vétérinaire que nous ramenons l’animal blessé. Possumwood est le seul sanctuaire pour kangourou du NSW qui possède une partie médicale. Steve, fondateur du parti politique animaliste en Australie, et Rosemary, docteure, sont des Australiens qui ont consacré une grande partie de leur vie à la préservation des animaux sauvages. Depuis peu, ils reçoivent une fois par mois des vétérinaires bénévoles dans la clinique qui procèdent à des opérations plus lourdes. J’ai notamment eu la chance d’assister à l’opération des dents d’un marsupial, ainsi que le retrait d’un œdème infecté d’un wombat. Et c’était… impressionnant !
Mon quotidien au sanctuaire
La journée typique au sanctuaire commence à 8 h. On donne le biberon aux joeys (bébés kangourous), on nettoie leurs chambres, les enclos des plus grands, puis on range, on fait des machines… En fin d’après-midi, il faut remplir les bacs de granulé et réapprovisionner en eau. Et il faut être généreux, car les marsupiaux vivent et se nourrissent de nuit !
De nuit, c’est d’ailleurs à ce moment de la journée que les Australiens chassent tragiquement les kangourous. Impensable, mais pourtant réel, les locaux n’apprécient pas tout le temps ces animaux si mignons et uniques dans le monde. C’est une chose dont on ne parle pas assez, mais j’ai malheureusement constaté en discutant avec des locaux que les marsupiaux sont considérés comme des rats qu’ils cherchent à éliminer.
Des nuisibles ?!
Mais comment ça, les Australiens n’aiment pas cet animal emblématique ? Effectivement, le gouvernement autorise des « professionnels », à abattre l’animal à quota de 4 millions chaque année. Ces « professionnels » sont en réalité des chasseurs. Leur excuse ? “Réguler la population », trop élevée selon eux. En l’espace d’une trentaine d’années, ils ont abattu plus de 90 millions de ces marsupiaux.
Après quelques recherches, on se rend très vite compte de la supercherie et on comprend qu’il s’agit en fait d’un enjeu financier. L’état voit en cette espèce une source de profit et des études montrent que la plupart des contrôles sont effectués afin de permettre une exploitation commerciale pour la viande et le cuir. En France notamment, la viande est vendue en supermarché.
Considérés comme des vermines qui mangent leur gazon pour les fermiers, une source de profits pour l’industrie de la viande et du cuir, le marsupial est donc massivement chassé de nuit dans son habitat naturel. Il a le malheur d’être l’espèce la plus chassée du monde.
Les écologistes et les propriétaires du sanctuaire dénoncent cet abattage légal. Sans parler du fait que cette régulation est injustifiée, les tirs manqués de cette pratique cruelle condamnent les adultes à une longue agonie. De plus, les bébés qui se trouvent dans leur poche meurent eux aussi dans de terribles souffrances.
Que puis-je faire pour aider ?
Alors, si vous souhaitez contribuer à votre manière pour l’arrêt de cette pratique, le premier geste est de ne pas acheter cette viande dans vos supermarchés préférés et de vérifier la provenance du cuir que vous utilisez.
Pour plus d’informations, vous pouvez visionner Kangaroo de Kate McIntyre Clere et Mick McIntyre sortie en 2015, film émouvant et réaliste ; ou visiter le site internet creativecowboysfilms.com qui recense un grand nombre de vidéos et articles (en anglais) sur le sanctuaire et sur les pratiques australiennes.
Vous pouvez aussi faire un don sur le site internet d’associations militantes comme WIRES ou WWF Australia, en grand besoin depuis que les feux de brousse ont tué une estimation de 3 milliards d’animaux l’année dernière.
Je remercie Possumwood (sanctuaire pour kangourou) pour leur travail formidable et je vous invite à les soutenir sur leur site internet Possumwood.com.au.
« We all live in this world and we should have the basic sense to look after it. » Nous vivons tous dans ce monde et nous devons tous avoir le bon sens d’en prendre soin.
Jade Reginensi, rédactrice bénévole pour New Hera 🍃